UIMM
Monsieur Hubert MONGON
Délégué général
56 avenue de Wagram
75017 PARIS
Paris, le 14 avril 2020
Courrier transmis par mail
Monsieur le Délégué Général,
En cette période de crise sanitaire et de confinement, nous vous rappelons que nous avons tous une responsabilité et que notre priorité en tant que partenaires sociaux de la branche de la métallurgie est de bien faire comprendre aux chefs d’entreprise qui ne travaillent pas dans les secteurs dits « essentiels », que c’est la santé des salariés qui prévaut. Face à cette pandémie, nous devons respecter les consignes de confinement du monde médical en laissant le plus de monde possible chez soi car c’est et cela reste la meilleure solution pour sauver des vies.
Nous portons une revendication pour les salariés qui travaillent dans les entreprises dites essentielles et pour les salariés volontaires qui ont accepté de reprendre le travail, tout en veillant aux conditions de protection irréprochables, l’attribution d’une prime qui ne doit pas se substituer aux augmentations de salaires générales et individuelles. Vous devez, en ce sens, inciter ces entreprises à le faire et à négocier avec les IRP.
Pour les secteurs non essentiels, au lieu de se précipiter dans des reprises d’activités, il faut que nous veillions et anticipions sur plusieurs mois une reprise progressive de l’industrie. En effet, nous savons, et nous en sommes conscients, que pour la trésorerie des entreprises, pour l’investissement et la recherche, il faudra bien à un moment donné reprendre toutes les activités industrielles. Tout comme nous savons tous que l’industrie ne redémarrera pas du jour au lendemain et, selon les secteurs, il serait bon d’essayer d’anticiper par palier et sur plusieurs mois ces reprises, en changeant les process de fabrication et l’environnement pour la santé. Il nous faut dès maintenant repenser à l’organisation du travail, au temps de travail lui-même, pour mieux le partager entre les salariés et éviter les pertes d’emplois pour la survie de toutes les entreprises.
En ces temps de crise sanitaire, nous devons toutes et tous faire des efforts pour soutenir et aider notre industrie, maintenir les emplois et éviter les licenciements. C’est pour cette raison que nous avons accepté la déclaration commune du 20 mars et de négocier et signer l’accord national du 3 avril 2020 portant sur les modalités d’organisation du travail pour faire face à l’épidémie de covid-19.
Nous souhaitons également, en termes d’exemplarité, que les chefs d’entreprise fassent aussi des efforts en ne versant pas les dividendes aux actionnaires et, déjà à l’instar de quelques-uns, présidents de groupe et de leurs comités exécutifs, qu’ils diminuent leurs rémunérations. Il faut aussi que vous preniez très au sérieux notre revendication au niveau de la branche, d’un fonds de solidarité pour pallier aux difficultés qu’elles soient d’ordre économique ou sanitaire.
Pour revenir à l’accord national de branche de la métallurgie du 3 avril, nous souhaitons avoir un état des lieux de la situation industrielle des différents secteurs de la métallurgie et des mesures d’urgence prises par les entreprises pour assurer, le jour de la reprise, toutes les conditions nécessaires à un redémarrage tout en assurant la santé et la protection des salariés. Nous vous demandons également, au regard de cet accord du 3 avril, de bien différencier l’application de notre accord pour les entreprises en redressement judiciaire et en PSE afin que les salariés ne soient pas pénalisés. Tout comme nous vous demandons de faire respecter les négociations en cours dans les entreprises, elles doivent être loyales comme nous l’avons spécifié dans notre accord.
Monsieur le Délégué Général, à travers ce courrier, nous vous livrons notre réflexion pour essayer de contribuer à la reprise de l’industrie face à une crise sanitaire inédite, avec un drame humain et un bilan trop lourd et insupportable en termes de décès. Nous nous devons de ne pas subir et d’anticiper ce qui pourrait être également un drame industriel. Nous avons toujours pris nos responsabilités, mais il faut faire attention et éviter les déclarations abusives du Medef.
Nous pensons que le modèle économique mondial et européen doit être repensé en mettant au cœur l’humain avant la seule logique financière. Notre pays ne doit plus subir les cures régulières d’austérité qui nous ont conduits, dans de nombreux domaines, « droit dans le mur », sans compter certaines réformes néfastes. Les gouvernements successifs ont cassé notre système hospitalier et ils portent une large responsabilité face aux conséquences liées à cette crise sanitaire.
En ce qui nous concerne et au niveau de notre branche, nous nous devons également de nous poser collectivement la bonne question des relocalisations indispensables et nécessaires à l’approvisionnement de nos filières et au bon fonctionnement de notre industrie. Tout comme nous nous devons de veiller sur un plan industriel à l’indépendance de notre pays pour protéger humainement les concitoyens et les salariés. Il faut à notre avis redévelopper l’industrie, elle a été, trop souvent à notre goût, abandonnée au profit du court terme et de la seule logique financière. Il ne faut pas non plus que les conséquences de cette crise sanitaire aboutissent à casser la dynamique qui s’était engagée au niveau national et au sein des Comités stratégiques de filières (CSF). Il faut s’orienter vers un plan d’avenir industriel et ce en lien avec France Stratégie et le Conseil National de l’Industrie (CNI).
A celles et ceux qui ont si souvent critiqué notre vieux monde, notre modèle de protection sociale et remis en cause le dialogue social et le paritarisme, il serait bon, non pas de les condamner, mais de les inciter à tirer les leçons du passé pour éviter à l’avenir de nous retrouver dans la situation dramatique que nous connaissons avec cette crise sanitaire.
Tout comme nous demandons à celles et ceux qui critiquent, à des fins purement politiques et électoralistes, nos accords nationaux de branches ou les accords d’entreprise signés par nos représentants, d’arrêter la récupération malsaine d’une période dramatique pour tenter de discréditer celles et ceux qui prennent leurs responsabilités. Nous en sommes certains, le temps nous donnera raison.
Pour la Fédération FO de la Métallurgie, nous avons une priorité, protéger les salariés, et un double objectif, préserver les emplois et défendre notre industrie. A ce titre, notre slogan :
« Notre Industrie et Nos emplois » est plus que jamais d’actualité.
Monsieur le Délégué Général, nous souhaitons que vous fassiez connaître nos analyses et propositions au sein de vos différentes instances patronales internes à l’UIMM.
Dans l’attente de votre réponse et d’un échange paritaire au sein de notre branche, recevez, Monsieur le Délégué Général, l’expression de nos sentiments distingués.
Frédéric HOMEZ
Secrétaire Général